
Le visage à moitié dans l'eau et la boue, transit de froid, ce fût comme s'il se réveillait d'un très long, trop long sommeil. L'odeur de décomposition lui prenait le nez, il s'entendit grogner. Les bras étendus dans une position grotesque, il peina à les déplacer, ne serais-ce que pour poser les mais sur le sol boueux et se relever. Les forces lui manquaient toujours, et il reposa les bras dans lamelles de matière molle et froide.
Il releva la tête, les yeux pleins de débris, fermés, incapable de s'ouvrir. Il avait mal, et la brûlure de ses yeux n'était qu'un détail. Chaque atome de son corps semblait rigidifié à l'excès.
Dans un effort colossal, il parvint à ouvrir les yeux une fraction de seconde.
Son seul œil ouvert à raz de la surface sombre vit une multitude de tâche oranges et lumineuses briller et s'agiter en arrière plan telles les feuilles d'automnes qui, secouées par le vent, se laissaient aller à un ballet tumultueux et incessant.
L'Automne... Des feuilles mortes... D'où l'odeur...
C'était joli. C'était apaisant aussi, surtout de se dire que cette odeur de mort était simplement due à la nature qui achevait son cycle, et que bientôt, des senteurs printanières allaient prendre le relais et faire oublier toutes ces émanations.
Juste devant lui, un petit piaf se tenait immobile, ses pattes graciles reposant dans le liquide qui reflétait les tâches ainsi que son portrait. La petite créature, d'autant qu'il avait pu le voir, fixait ses doigts qui dépassaient de l'eau.
Elle émit un son strident et prolongé.
Le cœur battant, le pilote échoué se redressa et parvint à ouvrir les yeux pleinement.
Ses glandes surrénales s'excitèrent alors, et une décharge d'adrénaline lui fouetta la tête, le réveilla brusquement. Soudain, le son des feuilles mortes laissa place au crépitement du combat qui s'était déplacé en arrière plan et illuminait le ciel entier de ses explosions, ne laissant qu'une terre stérile.
Maintenant qu'il disposait de forces pour s'extraire du plasma et se redresser, il s'aperçut alors qu'un énorme cratère de cent mètres de diamètres le séparait de la créature devant lui. Le piaf ouvrit sa gueule pleine de dents triangulaires, une gueule rougeoyante de chaleur, élancée et laissa échapper un jet de fumée. Sur sa cloison pectorale de bronze, une trappe s'ouvrit et laissa échapper deux jets de flammes qui faisaient rougir les angles biseautés de sa cuirasses.
Un chasseur s'écrasa un kilomètre plus loin en projetant un champignon vert-fluo. Le piaf tourna son horrible tête dans sa direction, presque nonchalant, tandis qu'il déplia ses voilures solaires et fit claquer ses trois longues queues au sol dans craquement sourd de roche brisée.
En se relevant, il vit autour de lui une butte de cadavres à la peau fondue. Ce qu'il avait prit pour des feuilles entre ses doigts était en fait des lamelles de peaux rendues élastiques par la frappe des canons de la république, si bien qu'il était impossible de distinguer les hommes des orcs, les orcs des elfes, et parmi tout ce joyeux brassage organique, les hommes des femmes. Tous les uniformes avaient été pulvérisés, et l'amas de corps à la chaire nue avait tout d'une toile de maître aux idées noires gavées de psychotropes. La marre de sang dans laquelle il pataugeait remua mollement tandis qu'il se hissait sur ses jambes encore maladroites. Son bras droit refusait de répondre, et lui même refusait de regarder.
Le ptère reporta son attention sur lui, fixant le pilote miraculé de ses deux leds vertes. Marcus constata avec stupéfaction qu'il n'en avait jamais vu d'aussi énorme. D'après la souche de grand pin qui menaçait de tomber dans le cratère et qui, par miracle, tenait encore en biais, il put estimer sa taille à une dizaine de mètres de hauts.
Alors qu'il prenait appui sur ses énormes serres constituées de lames de rasoir articulées, ses gigantesques ailes dépliées, ses trois queues longues comme tout le reste de son corps frappant le sol avec impatience, Marcus vit alors une autre silhouette se dessiner en ombre chinoise devant les flammes des combats aériens.
Une jeune femme gracile se tenait juste à côté de la bête. Elle scrutait dans sa direction, une paire de jumelles appliquées sur ses arcades. Le léger vent aux relents de mort faisait s'agiter sa longue chevelure. Marcus, stupéfait, ne pensa même pas à s'enfuir. Piégé dans une boue sanguinolente qui l'empêchait de courir, désarmé au milieu d'un champ de bataille en putréfaction et sur lequel il ne comptait aucun allié, il ne lui restait plus qu'à prier pour que ça aille vite.
J'ai échoué... pensa-t-il.
Alors que le ptère allait s'élancer, la jeune femme tourna son visage vers lui, il s'inclina, et elle monta sur sa tête, tenant grâce à des rennes, un panneau en bronze surmonté d'un paratonerre lui faisant office de bouclier. Tremblant de frustration mais obéissant, le ptère accepta de tourner son regard au loin avant de s'envoler vers une destination que lui seul ainsi que sa maîtresse connaissait.
Juste avant de décoller, le regard de sa cavalière croisa celui de l'échoué. Tous deux comprirent qu'ils se connaissaient, mais le devoir incita la femme à s'envoler ailleurs. Tel un fil les reliant à travers l'espace, tous deux partagèrent le même soulagement. Marcus retomba à genoux dans le magma visqueux et puant.
Alors qu'il éclata d'un rire nerveux, les flammes des combats perdirent en intensité, faisant place progressivement à des volutes de fumées grises dans lesquelles des décharges ioniques se formaient. Une foudre de haute altitude frappait les chasseurs encore en pleine bataille. Semblables à une main verdâtre, décharnées et aux doigts crochus comme celle d'une vieille sorcière, des gerbes d'éclairs emportaient les pilotes de façon impartiale, les prenant par lots de cinq ou six.
Bientôt, le ciel se dégagea. Les combats déménagèrent au delà de la stratosphère, derrière les nuages de fumée ionisée et bientôt, Marcus fût seul homme au milieu de l'immensité stérile.
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