Vaincre ou mourir
Réalisation Paul Mignot Vincent Mottez
Scénario: Vincent Mottez
Musique: Nathan Stornetta
Acteurs principaux:
Hugo Becker
Jean-Hugues Anglade
Rod Paradot
Constance Gay
Francis Renaud
Sociétés de production
Puy du Fou Films
Studiocanal
Pays de production

Genre
Historique
Durée
110 minutes
Sortie 2023
_______________
J’ai laissé passer le tapage médiatique local et j’ai enfin visionné "Vaincre ou mourir" le biopic sur Charette. En cinéphile averti et aujourd’hui passionné depuis longtemps par cette page trop méconnue de notre histoire, je me devais de poser un œil critique sur ce film.
Que dire ?
Beaucoup de points négatifs malheureusement mais commençons par le positif.
La réa et les images ne sont pas aussi catastrophiques que ce que j'avais lu dans certaines critiques. Ce n’est pas du grand cinéma, c’est plutôt même du niveau des meilleurs téléfilms historiques français mais, cela se regarde. Il ne faut juste pas s’attendre à un choc visuel ou a une leçon de 7e art. Et c’est malheureusement le seul point positif, si c’en est un, que je peux souligner… C’est maigre je le reconnais.
Pour le reste… commençons par la technique
Le film souffre d’un ENORME problème : son écriture. A vouloir trop montrer en peu de temps, la première moitié du film enchaine les séquences sans les lier sinon à travers une voix off bien trop présente. Cela rend l’ensemble difficile à suivre pour qui ne connais pas le sujet, et fait naitre cette curieuse sensation de ne pas être devant un film de fiction mais un docu-fiction.
Ce parti-pris qui cherche probablement à éclipser les débuts en vérité peu glorieux du général Vendéen tombe mécaniquement dans des travers inévitables de part ce mode d’approche : trop d’ellipses au détriment de l’histoire et de la psychologie, d’où un manque d’identification et d’intérêt pour les personnages que l’on ne fait que survoler. Il faut prendre le temps pour bien raconter les choses, et là on a plutôt décidé d’aller (trop) vite ; passant sous silence des pans entiers de l’histoire de Charette. Pas un mot sur les principales victoires (ou défaites) de Charette en 1793 sauf Torfou et (très rapidement) Nantes, batailles dans lesquelles il n’était pourtant pas le seul acteur, loin de là.
Je me réjouissais pourtant d’avance des possibilité visuelles qu’offraient le passage du Gois de nuit lors de l’attaque de Noirmoutier ; espoir déçu, tout est passé sous silence parce que le film veut manifestement s’attarder sur la dernière année de combat et la fin du général. Pourquoi pas, mais on se demande vraiment quel est l'intérêt de la première partie du film ; et si l'idée était de s'attarder sur la fin du général dans ce cas il fallait en faire le sujet principal au lieu de n’y consacrer que la seconde partie.
Soulignons au passage que les raccourcis hasardeux dans l’histoire entrainent des erreurs involontaires mais discutable dans un film qui est introduit par des historiens comme pour affirmer son sérieux. C’est le cas par exemple de la voix off qui laisse penser que Charette a remporté les victoires de Cholet, Saumur et Angers alors même qu’en vérité, il n’était même pas présent à ces batailles…
La seconde partie du film gagne un peu en intérêt. Le rythme trop rapide du début se ralentissant et les réalisateurs prenant enfin le temps de donner un peu (mais juste un peu) d’épaisseurs aux personnages. Mais c’est trop tard, on se fout finalement de la mort des uns et des autres tant le traitement des personnages était vide jusqu’alors. A force de rester distant, la froideur, le manque d’émotion et l’absence de souffle dans certaines scènes (les batailles en particulier) deviennent vite la caractéristique du film.
Bref, un parti pris dans le traitement du sujet particulièrement nuisible à l’histoire. C’est dommage, un tel sujet avait matière à un grand film épique et émouvant plutôt qu’à ce pseudo docu-fiction. Et je préfère ne pas parler du jeu de certains acteurs ni de l'aspect très théâtrale et sortant juste du pressing des costumes...
L’autre grand problème, craint celui-là, est l’influence du Puy du Fou sur le discours.
Qu’il y ait des adaptations avec les faits pour les rendre plus visuels ou plus facile à porter à l’écran, c’est normal. Mais une adaptation n’a rien à voir avec le mensonge. Et sur ce dernier point, le film s’en donne à cœur joie ! Si on ne connait pas l’histoire de cette guerre civile, on ressort du film en étant persuadé que :
- Charette était le seul et unique général en Vendée : bien sûr c’est totalement faux.
- Charette a tout gagné à lui seul : bien sûr là aussi c’est totalement faux. Et si le rôle de Charette n’est pas à négliger, il est même intéressant de rappeler, pour mieux saisir la manipulation du film, que le nombre de ses défaites est supérieur à celui de ses victoires, et qu’il ne compte dans ses victoires aucunes des grandes victoires vendéennes de 1793 (sauf Torfou) puisqu’il ne participa à aucune des grandes batailles (sauf Torfou donc et Nantes).
- Charette fut le seul signataire avec ses officiers du traité de paix : encore totalement faux même s’il est vrai qu’il était le principal signataire. Mais d’autres armées vendéennes étaient représentées et il ne fut pas le seul négociateur.
Pour faire simple, le film réduit l’histoire de la Vendée à l’unique action de Charette. C’est extrêmement réducteur et de fait particulièrement nuisible pour faire connaitre au grand public cette page d’histoire. Mais, me diriez-vous, c’est le propre d’un biopic que de centrer le point de vue sur une personne. Exact, mais pas au point de modifier l’Histoire. C'est un peu comme si on avait fait un film expliquant que le débarquement de Normandie ne s'était fait qu'avec le commando Kieffer et personne d'autre...
Représentatif de cette mentalité nuisible : le personnage secondaire de Jacques Maupilier est un bon exemple. Jacques Maupilier est un personnage qui a vraiment existé et dont le Puy du Fou s’est emparé pour imaginer son spectacle. Mais le vrai Jacques Maupilier, n’était qu’un simple combattant des Deux-Sèvres qui n’a jamais rencontré Charette… Le voilà propulsé dans le film comme un étant un des principaux combattants du général.
Cela démontre deux choses :
1) le film est plus une transposition du spectacle qu’un véritable biopic historique (on le devine également dans les raccourcis pour expliquer les raisons de la guerre, plus imprégnés du roman simpliste des historiens du XIXe siècle que du travail plus approfondi des historiens actuels) ce qui est d'autant plus grave, en terme de manipulation que, comme je l'ai dit, le film est introduit par des historiens
2) Pour les auteurs, le respect de l’Histoire est secondaire.
Encore un rendez-vous manqué entre le cinéma et l’histoire de la Vendée. C’est dommage, d’autant plus que ce film, paradoxalement négationniste sur cette histoire, risque bien de rebuter les producteurs et auteurs qui auraient été tentés de se pencher sur cette page de notre Histoire qui comporte en son cœur pourtant de quoi faire mille films passionnants.
Dernière édition par cirederf le Mar 4 Juil 2023 - 16:25, édité 1 fois
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